Visite des congressistes du 2e Congrès international de forage (21 septembre 1929)


Ce congrès, qui s'était tenu du 16 au 18 septembre 1929 à l'hôtel de Rothschild, rue Berryer à Paris, s'est prolongé par la visite des installations de Pechelbronn.
Les frères Conrad et Marcel Schlumberger venaient d'y faire leurs premières expériences de carottage électrique, procédé à l'origine de la société Schlumberger, mondialement connue.
Le compte-rendu de cette visite est tiré de La Revue Pétrolifère.
Le samedi matin, à 9 h 30, les présidents des différentes délégations partent visiter les puits et galeries de la Société Pechelbronn. Les autres congressistes se rendent à l'Ecole Nationale supérieure de Pétrole.
(...) A 13 h 15, le train spécial composé de six voitures, qui doit conduire les congressistes au terme de leur voyage, quitte Strasbourg. A 14 heures, il arrive à Soultz-sous-Forêts, où il entre sur le territoire de la concession
pétrolifère exploitée  par Pechelbronn S.A.E.M. La locomotive du réseau d'Alsace-Lorraine cède la place à une machine de la Société et le train roule sur l'embranchement spécial de Pechelbronn jusqu'au village de Kutzenhausen,
où les congressistes arrivent à 14 h 15 pour assister à la première partie de la visite organisée à leur intention sous la direction de M. Pelissier, Directeur général de Pechelbronn S.A.E.M., visite intéressante certes, pour les spécialistes
des questions pétrolières. L'exploitation compte, groupées sur une même concession, 48 tours de sondage, totalisant en une année plus de 50 000 mètres forés. Ce qui fait de Pechelbronn un des chantiers de forage les plus importants
qui soient en France et même en Europe.
La visite des forages et des installations de pompage s'effectue par groupes sous la conduite des ingénieurs de la Société. Auprès de deux tours de sondage, on procède à des expériences dites de carottage électrique, méthode de prospection
tout à fait moderne, et qui a fait l'objet d'une communication préalable au Congrès. Elle est due à deux savants géologues, qui ont donné une grande impulsion à la prospection géophysique, MM. C. et M. Schlumberger, et mise au point,
en ce qui concerne le pétrole, dans la concession de Pechelbronn. Ces expériences constituent une des parties les plus intéressantes de la visite.
A 15 h 30, les congressistes reprennent le train pour Merkwiller où se déroule la seconde partie du programme : la visite des usines de raffinage et du carreau d'une mine.
Il convient de s'arrêter ici sur la méthode d'exploitation employée à Pechelbronn. Lorsque les pompages paraissent avoir épuisé le gisement, on procède à l'exploitation par puits et galeries, méthode que l'on s'étonne parfois de trouver appliquée
à l'extraction du pétrole et qui constitue l'originalité de l'exploitation alsacienne.
Cette particularité intéressante en matière d'extraction ne l'est pas moins en matière de forage. Dans les autres exploitations, le foreur opère sans jamais se rendre compte de la manière dont sa sonde a progressé. Ici, le sondeur, dont le travail,
après plusieurs années, sera rencontré par les galeries creusées pour drainer le pétrole, peut se rendre compte, après coup, de la façon dont ses appareils se sont comportés dans les terres, et de l'aspect présenté par le fond de sa sonde.
Il peut tirer de cet examen des enseignements précieux pour ses travaux ultérieurs.
La visite des installations de raffinage s'effectue sous la conduite de M. Bertaux. L'actif Secrétaire général de la Société Pechelbronn avait organisé cette visite, qui représentait au point de vue technique la partie la plus importante du voyage,
avec un soin tout particulier.
Après cette visite, un goûter copieusement servi et arrosé des meilleurs crus du Rhin, réunit les Congressistes, puis c'est à nouveau le départ pour Strasbourg. Le soir, le banquet offert par la Société Minière de Pechelbronn a lieu près de l'Orangerie,
dans les salles de restaurant Baekehiesel (sic). M. Ferdinand Herrenschmidt, président de la Chambre de Commerce de Strasbourg et président du conseil d'administration de la Société, fait les honneurs du dîner. A ses côtés prennent place MM. Boromée, préfet du Bas-Rhin, M. Lantenois, inspecteur général des mines, M. Tissier, président du Conseil d'Etat, M. Pineau, directeur de l'Office national des combustibles liquides, M. Pellissier, directeur général de la Société Pechelbronn.
A l'issue du banquet, M. Herrenschmidt prononce le discours suivant :
« (...) Ce qui, pour le sondeur, est intéressant à Pechelbronn et ce qu'il ne peut voir nulle part ailleurs, c'est le fond de sa sonde. En pénétrant dans les profondeurs du sol, le mineur lui décèle comment son trépan a touché le gisement.
Il lui montre comment les porosités de la roche se colmatent, comment la sonde a maintenu sa verticale, comment le tubage s'est comporté. Le sondeur touche du doigt le résultat de son travail et c'est pourquoi les exploitations de Pechelbronn
sont un livre vivant où le foreur lit le résultat d'aujourd'hui et devine le perfectionnement de demain. A ce point de vue, l'intérêt de Pechelbronn est grand.
C'est aussi dans la concession de Pechelbronn que MM. Schlumberger, auxquels nous sommes redevables de nombreux perfectionnement dans le développement de la prospection géophysique, ont mis au point l'application de leurs méthodes,
quand ils ont voulu les diriger sur la recherche des gisements pétrolifères.
Dans cette science géologique, où les théories les plus sûres sont à la merci du troublant mystère des profondeurs du sol, ils ont éclairé le phare qui guide le patient et trop souvent décevant travail du sondeur.
M. l'inspecteur général Lantenois a bien voulu, au cours de votre congrès, souligner fort aimablement le rôle de Pechelbronn dans la mise au point de ces méthodes et je tiens à lui dire combien nous avons été sensibles à ses paroles.
Une industrie ne poursuit jamais uniquement la réussite financière. Elle ne peut s'enfermer dans d'égoïstes barrières, mais doit chercher à faire bénéficier l'école et la science des expériences qu'elle fait.
Pechelbronn s'applique à suivre cette ligne de conduite. Des centaines de visiteurs viennent annuellement parcourir ses installations et y affermir leurs connaissances. Ses exploitations de drainage des couches pétrolifères sont un modèle unique au monde.
Là où l'huile n'arrivera plus à la pompe placée au fond du trou de sonde, l'exploitation par puits et galeries, mise au point par le patient labeur et les observations précises de nos ingénieurs, apportera encore aux hommes une richesse qu'ils ne pouvaient
plus atteindre.
Des étudiants de toutes les nationalités sont venus, au cours des dernières années, confronter leurs connaissances théoriques avec la pratique effectuée sur notre concession et munis de cette science complétée, ils ont essaimé dans les coins de l'Europe.
Les ingénieurs de Pechelbronn ont été, dès le début, les collaborateurs les plus dévoués de M. le directeur de l'Ecole du pétrole et M. Weiss ne me contredira certainement pas si j'affirme que beaucoup de ses élèves ont matérialisé leurs connaissances récemment acquises sur les exemples que nos exploitations leur ont fournis (...). »
Le lendemain dimanche, les congressistes quittent Strasbourg à 9 heures, et, par une route des plus pittoresques à travers les Vosges arrivent à Hohwald où le déjeuner leur est servi dans un cadre merveilleux. L'excursion se termine pae l'ascension du Mont-Sainte-Odile, au sommet duquel la vision grandiose sur la fertile plaine d'Alsace et les Vosges remplit les yeux d'admiration (...).

(La Revue Pétrolifère, n° 339, 28 septembre 1929).