
Visite du député Loysel (été 1795)
Au début de l'été 1795, Pechelbronn reçoit la visite de Pierre Loysel, député de l'Aisne,46 ans.
Il avait
été envoyé en mission d'inspection par la Convention nationale dans les
salines lorraines, les mines d'asphalte du département du
Bas-Rhin ainsi que dans les mines des pays nouvellement conquis d'entre
le Rhin et la Moselle.
Au Pechelbronn,
il rencontra la veuve d'Antoine Le Bel, née Anne Catherine de
Saint-Roman, ainsi que Jean André Geynet, qui dirigeait l'établissement
depuis qu'il avait épousé début août 1794 Anne Antoinette Rosalie, la
seconde fille d'Antoine Le Bel.
Le rapport, que
le conventionnel en publia en messidor an III, a son importance. Il a
fait accroître l'idée qu'Anne Catherine de Saint-Roman descendait
d'Abraham Duquesne (1610-1688), l'amiral protestant et d'origine
dieppoise de Louis XIV.
Ce qui n'est
aucunement vérifié, les Saint-Roman étant catholiques et d'origine
aveyronnaise comme les Le Bel, et que Saran, le patronyme de la mère
d'Anne Catherine, ni figure pas parmi la descendance connue de
l'amiral.
La veuve
d'Antoine Le Bel aurait-elle inventé cette ascendance sans culotte pour
mieux se faire passer pour républicaine, alors que dans sa famille on
avait plutôt combattu la Révolution ?
Loysel exagère d'autre part quelque peu la profondeur des gisements exploités.
Le puits
Catherine que la veuve d'Antoine Le Bel avait fait ouvrir fin 1793 ne
descendait qu'à 80 pieds ; et le puits Antoine, le dernier puits ouvert
par époux, à 108 pieds, soit un peu plus de 30 m.
Loysel se trompe enfin sur la date de création de l'établissement.
On ne connaît en
France de manufactures d'asphalte que dans les départements du Bas-Rhin
et du Jura. Ces manufactures méritent par leur utilité, surtout en
temps de guerre, une protection spéciale du gouvernement.
On sait que la
graisse minérale ou asphalte qui s'y fabrique remplace avantageusement
le suif, le vieux oing et autres graisses animales, dont on se sert
pour adoucir le frottement dans les machines des différentes
manufactures et pour les voitures de toute espèce, les transports
militaires.
L'activité des
manufactures et surtout des forges est utilement liée à l'existence des
manufactures d'asphalte, lorsqu'on ne peut pas se procurer de graisses
animales, et l'on n'ignore pas que dpeuis la guerre ces dernières ont
été fort rares.
L'asphalte qui
les remplace les rend même, dans tous les temps, disponibles pour les
autres besoins de la société, soit pour faire de la chandelle avec le
suif, soit pour les faire entrer dans la composition du savon.
La manufacture
d'asphalte le plus importante dans le Bas-Rhin est celle de Beckelbonn,
commune de Lampertsloch, à trois lieues du district de Weissembourg.
Elle appartient à la citoyenne Lebel, descendante du vice-amiral Duquesne, célèbre par le bombardement d'Alger.
Si son ancêtre
mérita bien de la patrie par ses services militaires, la citoyennen'est
pas moins intéressante aux yeux de tous les bons citoyens par ses
qualités civiques, par les vengeances que les ennemis ont exercées sur
sa personne et ses propriétés lors
de leur invasion sur le territoire français, enfin par les sacrifices qu'elle a faits pour remettre la manufacture en activité.
Elle a un fils à l'armée, digne héritier du courage de Duquesne.
Le citoyen Geynet, gendre de la citoyenne Lebel, est à la tête de cette manufacture et en dirige toutes les opérations. Il est connu par ses talents et ses vertus civiques.